Evolutions réglementaires sur la durabilité en Suisse et en Europe

Découvrez le prochain thème du 15ème Forum d'Affaires Franco-Suisse qui aura lieu le 25 septembre 2024 à Genève.

Philippe Bernard, Vice-Président de la CCI France Suisse, Président de la Commission Développement Durable et CEO Adjoint de Losinger Marazzi nous présente les évolutions réglementaires sur la durabilité en Suisse et en Europe et comment les entreprises Suisses peuvent s’inspirer de l’avancée de certaines entreprises françaises.

Pourquoi avoir choisi le sujet de la durabilité comme levier de succès pour le Forum d'Affaires Franco-Suisse 2024 (FAFS 2024)?

La Chambre de Commerce et d'Industrie France-Suisse (CCIFS) a fait de la durabilité une priorité stratégique, d’abord en tant qu’influenceur économique avec ses 1000 entreprises membres, et en tant qu’organisation avec ses 25 collaborateurs présents à Genève, Bâle et Zürich. Dans un contexte où les exigences réglementaires et les attentes sociétales en matière de responsabilité environnementale ne cessent de croître, il nous paraît vital pour les entreprises d’intégrer ces changements pour rester compétitives.

En choisissant le thème de la durabilité, le FAFS 2024 vise à sensibiliser et à préparer les entreprises à ces enjeux.

La durabilité n'est plus une simple option ; elle est devenue un impératif pour répondre aux défis du marché actuel et futur. La CCIFS considère que son rôle est d'accompagner les entreprises dans cette transition, en leur fournissant de l’information et de l’inspiration pour intégrer la durabilité dans leur modèle économique.

Pouvez-vous nous rappeler les changements clés pour les entreprises européennes en termes de durabilité ?

Les entreprises européennes, en particulier celles opérant en France, sont actuellement confrontées à des changements réglementaires significatifs en matière de durabilité. Ces évolutions, imposées par la législation européenne, redéfinissent les obligations des entreprises en matière d’engagements, de reporting et de gouvernance durable, créant ainsi un cadre plus strict et plus exigeant.

L’une des principales évolutions est l'introduction de la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui remplace et étend les obligations de la précédente NFRD (Non-Financial Reporting Directive). La CSRD impose aux entreprises de publier des rapports détaillés sur leurs performances en matière de durabilité, incluant des informations sur l'impact environnemental, social et de gouvernance (ESG). Ce nouveau cadre concerne non seulement les grandes entreprises, mais également un nombre croissant de PME (les entreprises employant plus de 250 salariés et ayant un chiffre d’affaires supérieur à 40 millions € ou un total de bilan supérieur à 25 millions €), et vise à augmenter ainsi la transparence et la responsabilité des entreprises vis-à-vis de leurs parties prenantes.

En parallèle, la directive CS3D (Corporate Sustainability Due Diligence Directive) introduit des exigences en matière de diligence raisonnable, obligeant les entreprises à identifier, prévenir, et atténuer les impacts négatifs de leurs activités sur les droits humains et l'environnement, non seulement au sein de leurs propres opérations, mais aussi tout au long de leur chaîne d'approvisionnement. Cette directive représente un tournant majeur, car elle responsabilise les entreprises pour les actions de leurs fournisseurs et partenaires commerciaux, renforçant ainsi leur rôle dans la promotion d'une économie plus durable et éthique.

Ces nouvelles réglementations entraînent des changements profonds dans la manière dont les entreprises opèrent et rendent compte de leurs activités. Elles doivent désormais intégrer la durabilité dans leur stratégie globale, en mettant en place des systèmes de suivi et de reporting

robustes, et en adaptant leurs processus de gouvernance pour se conformer aux nouvelles exigences légales.

L’Europe et la France ont déjà commencé à mettre en œuvre ces normes. Sachant qu’elles vont bientôt arriver en Suisse, quelles leçons nos entreprises en Suisse peuvent-elles en tirer ?

Les entreprises françaises et européennes ont déjà commencé à naviguer dans ces nouvelles eaux réglementaires, et leurs expériences offrent de précieuses leçons pour les entreprises suisses.

Le principal enseignement est l'importance de s’adapter aux nouvelles régulations le plus tôt possible. Les entreprises qui ont anticipé ces changements ont pu s'y adapter progressivement, évitant ainsi des perturbations majeures dans leurs opérations. Les entreprises suisses gagneraient à anticiper le déploiement d’actions en lien avec des réglementations. Par exemple, une première action pourrait être d’intégrer des demandes et pratiques durables dans leurs chaînes d’approvisionnement.

Enfin, ces normes impliquent des adaptations sur la gouvernance des entreprises, en particulier les conseils d'administration et les équipes de direction qui doivent disposer d’outils pour superviser la conformité.

En matière de durabilité, on parle avant tout de conformité réglementaire. Y a-t-il aussi des opportunités de croissance et d’innovation dans ce domaine ?

Les entreprises doivent intégrer que ces changements ne sont pas simplement qu’une question de contrainte ou de conformité, mais représentent surtout une transformation profonde des attentes du marché, donc à un enjeu de positionnement de marché.

C’est pourquoi, la durabilité ouvre des perspectives passionnantes en termes de croissance, d'innovation, et de compétitivité. Les entreprises qui adoptent une approche proactive de la durabilité ne se contentent pas respecter les normes ; elles en tirent également des avantages stratégiques significatifs.

Les marchés financiers reconnaissent de plus en plus la valeur des entreprises durables. Les fonds d'investissement responsables et les institutions financières sont à la recherche d'entreprises engagées dans des pratiques ESG (environnementales, sociales et de gouvernance). Les entreprises qui intègrent la durabilité dans leur stratégie peuvent non seulement attirer ces investissements, mais aussi bénéficier de conditions de financement plus favorables.

La durabilité peut être en outre un catalyseur d'innovation. En cherchant à réduire l'impact environnemental de leurs opérations, les entreprises sont souvent amenées à repenser leurs processus, à développer de nouveaux produits, ou à adopter des technologies innovantes. Cela peut aboutir à des solutions plus efficaces, à des coûts réduits, et à des produits plus attrayants.

Et enfin, les talents d'aujourd'hui, en particulier parmi les jeunes générations, sont de plus en plus attirés par les entreprises qui partagent leurs valeurs. Une entreprise engagée dans une

démarche durable est perçue comme étant socialement responsable et éthique, ce qui renforce sa marque employeur, c’est-à-dire son attractivité en tant qu'employeur.

Sur la base du programme de cette année et de l’expérience des éditions précédentes, que peuvent attendre les participants du Forum ?

Le FAFS est plus qu'une simple conférence mais un véritable événement de réseautage ; c'est une plateforme où les entreprises peuvent acquérir des connaissances précieuses, établir des partenariats et découvrir des solutions et pratiques innovantes pour répondre aux défis de la durabilité.

Les ateliers pratiques de l’après-midi permettront aux participants de plonger plus profondément dans les aspects concrets de la durabilité. Ces ateliers, animés par des experts du domaine, offriront une approche à 360° sur différentes thématiques de la durabilité, abordant des sujets tels que les défis juridiques liés aux rapports de durabilité pour les PME, l'élaboration de stratégies RSE efficaces, l'adaptation des PME à la transition écologique, et les bonnes pratiques pour mobiliser sa chaîne de valeur ou ses équipes en interne.

L'un des points forts du FAFS 2024 est l'organisation de rendez-vous B2B sur mesure. Ces sessions offrent aux participants l’opportunité de rencontrer des partenaires potentiels, d'explorer de nouvelles collaborations, et de nouer des relations commerciales. Les participants repartiront avec des exemples de réussites, une boite à outils et des contacts pour mettre en place une stratégie en faveur de la durabilité et des plans d’actions au sein de leur entreprise.

Philippe Bernard, Vice-Président de la CCI France Suisse et Président de la Commission Développement Durable.

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